1. Compte-rendu de mission au Congrès de l’AIBM de Göteborg 18-23 juin 2006
Remarques générales
La Conférence annuelle de l’Association internationale des bibliothèques, archives et centres de documentation musicaux, s’est tenue à Göteborg, Suède, du 18 au 23 juillet 2006. Elle était organisée par la branche suédoise de IAML, et réunissait les membres de deux autres associations internationales : IMS (Société internationale de musicologie) et IAMIC (Association internationale des centre de documentation sur la musique contemporaine). Cette conjonction d’associations explique une participation très nombreuse (plus de 400 inscrits) et un programme dense et varié.
Le lieu des réunions était le département d’études musicales, théâtrales et lyriques de l’Université (Artisten).
La délégation française comptait 18 participants. Les pays du nord de l’Europe ont fourni les plus forts contingents.
La problématique générale qui articulait le programme scientifique des réunions de travail, la musique classique contemporaine, a permis des déclinaisons très fructueuses. En outre elle permettait de constater les liens indissociables qu’entretiennent le monde de la documentation musicale (ses objectifs, ses méthodes, ses outils et ses acteurs), celui de la recherche musicologique et celui de la diffusion.
La Commission audiovisuelle
En tant que présidente de la commission des documents audiovisuels, j’eus la charge d’organiser et d’animer deux sessions publiques.
L’une (le mardi 20) au contenu « technique » présentait 4 programmes de conservation de collections sonores patrimoniales, c’est-à-dire, importantes en nombre et uniques en terme de contenu et qu’on numérise avant tout à des fins de préservation à long terme
Pio Pellizzari, directeur de la Phonothèque nationale suisse a fait, à propos du plan de sauvegarde du patrimoine audiovisuel suisse au quel son institution participe, un exposé de problématique générale sur l’archivage numérique. Antony Gordon, pour les British sound archives, a suivi toutes les opérations pratiques qui constituent les filières de conservation des supports du son, depuis les cylindres jusqu’aux supports numériques. Mary Wedgewood a présenté d’une part le NAVCC (National Audiovisual Conservation Center) site de conservation en cours de construction par la Library of Congress à Culpeper (Virginie), d’autre part le National Recording Registry qui, en vertu d’une loi fédérale de 2000 et sur l’avis du National Recording Board, sélectionne chaque année 50 enregistrements sonores anciens à valeur nationale qui sont numérisés et mis à disposition du public en ligne sur le site de la Library of Congress. Enfin, j’ai moi-même décrit, en parallèle, les plans de sauvegarde des collections sonores du département de l’Audiovisuel de la BnF et de la Phonothèque des Archives de l’INA (en raison du désistement de dernière minute de l’orateur prévu qui m’a passé son texte à exposer).
L’autre (le vendredi 22) traitait de l’audiovisuel et de la musique en termes esthétiques, en proposant deux conférences sur le traitement de la musique par Ingmar Bergman. Deux universitaires suédois, le premier qui finit la rédaction d’une thèse sur l’histoire de la musique dans le cinéma suédois, le second qui est un spécialiste reconnu de l’œuvre de Strindberg et, à ce titre, a collaboré avec Bergman cinéaste et homme de théâtre, ont offert chacun un témoignage exceptionnel d’intelligence et d’émotion, l’un sur la musique des premières œuvres de Bergman, l’autre sur la fonction formelle, narrative et métaphysique de l’œuvre de Bach de Cris et Chuchotements à Sarabande.
L’administration de l’association
Deux réunions du Conseil (le dimanche 18 et le jeudi 22) et une Assemblée générale (le vendredi 23) ont préparé puis ratifié un certain nombre de points d’administration interne : le relèvement de 2 € du montant des cotisations, échelonné sur deux années ; le relèvement de l’indemnité annuelle de membres du bureau (secrétaire général, trésorier, éditeur de la revue Fontes et éditeur de la Newsletter électronique) ; la ratification des candidatures pour les postes de vice-présidents (8 candidats pour 4 postes) et de président (1 candidat) qui seront élus avant la prochaine Conférence de Sydney ; le lieu des prochains congrès et conférences jusqu’en 2013 et la réponse positive à l’invitation de Moscou pour 2010 ; la révision de la fréquence (annuelle ou triennale) des assemblées générales et de l’examen du budget…
Des réunions de travail (lundi 19 et le jeudi 21) ont permis de préparer le programme de la conférence prochaine, en juillet 2007 à Sydney. La commission audiovisuelle, en liaison avec la branche des Archives musicales et centres de documentation, présentera les sources sonores, écrites, iconographiques… des musiques d’Océanie et du Sud-Est asiatique. En outre, elle organisera une session « technique » sur les problèmes de la collecte et de la préservation des données musicales disponibles sur la Toile, profitant de l’expertise australienne en matière de capture du Web.
Réunions diverses
En outre, j’ai pris part à une table ronde organisée par la commission du catalogage (mardi 20), sur les évolutions en cours des règles et normes de catalogage, y défendant l’idée d’une harmonisation internationale des concepts et des modèles plutôt qu’une uniformisation des pratiques.
En auditrice, j’ai participé aux présentations de ressources mises en ligne à la disposition de la recherche ou de l’enseignement (avec deux offres, l’une suédois et l’autre finlandaise, de cours de culture et bibliographie musicales) parmi lesquelles le projet Philidor présenté par Laurence Decobert. De même j’ai assisté à la description par Mathias Auclair du fonds relatif aux Ballets suédois, entré en 1950 à la Bibliothèque-Musée de l’Opéra avec les archives du Centre international de la danse et qui a son complément, évoqué lors de la même session sur les archives de la musique suédoise en Suède et hors de Suède, au Dansmuseet de Stockholm.
J’ai également écouté 3 sessions proposées par l’IMS qui, chacune, envisageait les relations de la création contemporaine avec des « traditions musicales » : les musiques folkloriques (dans les Balkans ou dans les pays Baltes), la tonalité chez Carl Schnittke, le sens (et le retour vers des systèmes esthétiques renouant avec la métaphysique : l’esthétique d’Heidegger) ou la narrativité (dans l’opéra contemporain de Wolfgang Rihm ou Gerald Barry)…
Une réunion-hommage a célébré les 25 années du RIPM (Répertoire international de la presse musicale) : les témoignages de collaborateurs originels de divers pays (Italie, France, Russie, Allemagne et Etats-Unis) et un exposé par le fondateur et éditeur de cette entreprise qui dépouille, annote et indexe des collections de périodiques musicaux du XIXe et première moitié du XXe siècle. Au bilan (200 volumes et 500 000 notices dans la base de données), Robert H. Cohen a ajouté la présentation de l’étape prochaine consistant en l’accès en ligne au texte intégral numérisé. Cette présentation alliait explicitation bibliographique et argumentation « commerciale » se livrant à une publicité comparative avec les autres ressources en matière de dépouillement de la presse.
Concerts et visites
En complément des séances de travail, la conférence proposait des concerts illustrant la maîtrise des musiciens suédois des répertoires choral, contemporain, baroque ou, le dernier soir, veille de Midsummer, traditionnel.
En outre, à l’occasion de l’« excursion » de mi-congrès, nous avons pu apprécier les travaux du centre de recherche sur l’orgue de l’Université de Göteborg, animé par un musicologue venu des Pays-Bas, qui étudie, restaure ou reconstruit des instruments dans la tradition de l’école du nord de l’Allemagne aux XVIIe et XVIIIe siècles. On y croise l’organologie, la technique des matériaux (bois, métaux…), l’histoire de l’interprétation. Le tout permettant d’écouter, un après-midi durant, des pages de la littérature de l’orgue assorties aux instruments et aux lieux visités.
Elizabeth Giuliani,
Directrice des collections au Département de l’Audiovisuel de la BnF